Etre en deuil et demander du soutien
La perte d’un être cher est l’une des expériences les plus fortes et les plus douloureuses que l’être humain est amené à vivre. Car elle le confronte au vide, à la solitude, au sentiment d’abandon, à sa propre finitude. Elle le confronte à des émotions d’une grande intensité : peur, colère, tristesse, mais aussi culpabilité, honte, impuissance. Le choc d’un décès est comparable à un tsunami psychologique.
De nombreux éléments jouent un rôle dans la manière dont le processus de deuil va se vivre. Le lien avec le défunt, les circonstances de sa mort, son âge, l’absence ou la présence des rituels de deuil, la reconnaissance du deuil, la manière dont les deuils précédents ont été élaborés sont autant d’éléments qui peuvent rendre les tâches du deuil plus ou moins compliquées.
Faire le deuil - expression parfois galvaudée – s’apparente à une cicatrisation psychique dont il faut prendre soin. En d’autres termes, la cicatrisation ne peut s’envisager qu’à la condition de pouvoir vivre les émotions du deuil : les ressentir et les exprimer. Parfois, les émotions sont si fortes que la personne endeuillée ne peut – inconsciemment – prendre le risque de s’y abandonner. La douleur est trop menaçante. Des stratégies de protection s’imposent, sans qu’elle s’en rende compte. Ce n’est qu’au deuil suivant qu’elle ressentira peut-être la douleur de la perte précédente. Parfois des années plus tard.
Qu’est-ce qui pousse quelqu’un à nous faire une demande de soutien ? La souffrance, le besoin de parler de cette douleur, le sentiment d’être bloqué dans sa vie, l’envie de s’en sortir peuvent être des raisons de demander une aide neutre.
Chaque demande est prise en compte avec la personne endeuillée. Nous nous engageons avec elle dans un processus d’accompagnement qui respectera strictement son rythme et ses besoins. Aucune porte n’est poussée sans son accord. L’accompagnement autorise la personne en deuil à vivre ses émotions : pleurer, se révolter, exprimer son angoisse ou sa culpabilité. La personne endeuillée révèle parfois des pans de vie dont elle n’a jamais osé parler.
Chaque deuil peut être accompagné, si la personne endeuillée en ressent le besoin. Personne d’autre qu’elle ne peut prendre la décision de faire appel à une aide. Il arrive que l’entourage de la personne en deuil la pousse à entreprendre une démarche. Mais le rythme du deuil vécu par l’entourage correspond rarement à celui de la personne la plus touchée par le deuil. Elle est plus lente car son lien au défunt est d’un autre ordre.
Nous accompagnons aussi des deuils anciens, qui sont souvent restés bloqués et qui empêchent la personne endeuillée de s’investir dans la vie. Il n’est jamais trop tard d’entreprendre une démarche d’aide. Parfois, la personne endeuillée ne sait pas de quoi elle a besoin. Nous la rencontrons et l’accompagnons dans ce questionnement-là. A tout moment du processus, elle peut décider de poursuivre, de faire une pause ou d’arrêter. Nous sommes très attentifs au fait que chaque personne reste toujours actrice de son propre vécu.
Nous pensons, pour l’avoir observé à de réitérées reprises, que les deuils bloqués empêchent d’envisager un futur, entravent la dynamique de vie. Car très souvent, la personne endeuillée pense que cicatriser une telle plaie implique l’oubli de la personne aimée. Or les témoignages parlent d’une autre expérience. Les gens qui sentent que la cicatrice s’est refermée parlent du défunt comme d’une présence vivante et permanente en eux. Le deuil ne brise pas le lien, il le transforme.